mardi 23 avril 2024

Le « Bregret », un sentiment partagé par beaucoup de Britanniques ?

Par Antoine Bourge

 Au fond la courte victoire du vote « Leave » lors du référendum pour la sortie du Royaume-Uni de l’UE constitue encore l’argument choc pour contester la légitimité du résultat. Avec plus de 72 % de participation, c’est plus de 17 millions de votants (51,9%) qui optent pour la sortie et 16 millions (48,1%) contre. Difficile d’affirmer dans ces conditions que le résultat n’est pas représentatif ; à titre de comparaison, en général le taux de participation pour un scrutin européen tourne aux alentours de 30 % des inscrits et n'a jamais été considéré comme illégitime. Il est néanmoins évident que le peuple britannique était et reste divisé au sujet de son avenir.

 

Côté sondages. La plupart des sondages sont faits sur des échantillons faibles, soit environ 2000 sondés. Les questions ne font aucun doute sur l’orientation politique des commanditaires de sondages : « To what extent, if at all, would you support or oppose a referendum on whether the UK should join the European Union taking place in the next…? – Twenty years »[1]. Par conséquent, il est fort probable qu’une partie du panel pro-Brexit ne s’engage même pas à répondre au sondeur et oriente les résultats en faveur des pro-UE.

 

Côté étudiants[2]. Le site du Young European Movement[3] affiche son attachement à l’Europe mais a gommé toute référence à l’Union européenne alors même que ce mouvement est adossé au groupe European Movement qui milite pour une réintégration du Royaume-Uni dans l’UE. En somme, les jeunes veulent pouvoir aller étudier à l’étranger et déplorent la sortie du Royaume-Uni du programme Erasmus ainsi que les piètres débuts du nouveau programme d’échange baptisé Turing[4]. Pas étonnant qu’une majorité des moins de 30 ans ait milité ou continue de militer pour la réintégration dans l’UE.

 

Côté associations. « March for Rejoin » rassemble de nombreux comités locaux et européens favorables à la réintégration du Royaume-Uni dans l’UE mais sa portée semble  limitée aux milieux militants : ses rassemblements comptent quelques centaines de militants seulement alors que le mouvement dit s’exprimer pour les millions de personnes contre le Brexit et sa chaîne Youtube n’est guère fréquentée (800 abonnés et autant de vues pour les vidéos en ligne).

 

22/04/2024

A. Bourge

mercredi 3 avril 2024

Brexit, le croque-mitaine façonné par l'UE


Dans les médias euro-béats de toute obédience[1], le Brexit est vilipendé et serait la source de tous les maux du Royaume-Uni. Malgré tout, le 31 janvier 2020, les Britanniques ont repris le Graal qui leur permettrait de reconquérir tous les autres : leur souveraineté.

Faisons le point sur quelques idées reçues.

1)      Le Royaume-Uni s'enliserait dans une crise économique.

En 2021, une croissance record de 7,5% est enregistrée et septembre 2023, l'ONS (Office for National Statistics[2]) indique que le PIB du Royaume-Uni est 0,6% au-dessus de son niveau pré-pandémie. Avec 7,5% de croissance en 2021, le Royaume-Uni se place ainsi parmi les pays les plus performants du G7, derrière les États-Unis et le Canada, mais devant l’Italie, la France et l’Allemagne.

 

2)      Les échanges internationaux seraient défavorables au Royaume-Uni.

L'accord commercial avec l'UE voté le 24 décembre 2020 entre en vigueur après sa ratification par le Parlement européen le 27 avril 2021, ce qui normalise les échanges internationaux. Le commerce entre la France et le Royaume-Uni demeure stable avant et après Brexit[3] et les voisins européens restent naturellement des partenaires commerciaux majeurs (secteurs automobile, agricole, aéronautique, pharmaceutique, luxe).

Pour entériner la stratégie "Global Britain", les Britanniques ont conclu en mai 2023 un accord de libre-échange avec l'Australie ; relation qui leur était interdite depuis l'entrée dans le marché commun en 1973. D'autre part, l'adhésion britannique au partenariat de libre-échange trans-pacifique (CPTPP) a été entérinée en juillet 2023. Celui-ci compte 11 pays dont le Japon, la Nouvelle-Zélande, l'Australie, le Canada, le Chili, la Malaisie, le Mexique, Singapour.

Les négociations avec le gouvernement américain sont gelées mais le Royaume-Uni s'affaire à signer directement des accords de libre échange avec les États. A ce jour[4], le Royaume-Uni a déjà signé des accords avec huit États, soit près de 25% de l'ensemble de l'économie américaine.

 

3)      Le Royaume-Uni n'a pas su faire face à la crise du Covid-19 ?

C'est en partie vrai. Le Royaume-Uni, comme les services hospitaliers des autres pays européens, a dû faire face à des pénuries multiples en personnels (docteurs, infirmiers), matériel médical et médicaments. Les causes sont multiples : coupes budgétaires drastiques dans les hôpitaux publics[5] (National Health Service), baisse des indemnités à une population pauvre déjà très précarisée et gestion du dépistage du Covid par des entreprises privées incompétentes[6]. Le Brexit n'est pas responsable de l'impéritie du gouvernement et du rôle dévastateur du désengagement de l’État au profit de l'idéologie du marché tout puissant faisant fi de l'humain. Le taux de mortalité a été notoirement élevé au Royaume-Uni[7] en 2020-2021.

Il faut par contre noter qu'en collaboration avec la Suède, le Royaume-Uni a réussi à mettre au point le vaccin AstraZeneca et a massivement incité la population à se faire vacciner très tôt. Ainsi, le Brexit n'a pas tari la coopération entre les nations.

 

4)      L'UE protégerait les droits des salariés face à un Royaume-Uni peu protecteur socialement. Comme le dépeint très crûment le film Moi, Daniel Blake (2016) de Ken Loach, le Royaume-Uni de Thatcher jusqu'à nos jours n'est pas un modèle d’État social: entre 1960 et 2002, la population britannique touchant des revenus inférieurs à la moitié du revenu moyen est passée de 11% à 23% ! L'écart des revenus entre les plus pauvres et les plus riches n'a pas cessé de se creuser pour atteindre des situations comparables à l'époque victorienne. La réorientation des emplois industriels qualifiés vers des emplois de services, l'auto-entrepreneuriat et les contrats "zéro heure" favorisent des emplois précaires : 38% des bénéficiaires d'aides sociales avaient un emploi en 2023.[8] Dès avril 2024, face à une inflation galopante[9] le salaire minimum sera revu à la hausse[10] de 9,7%. Un revirement historique des Tories en lieu et place du dogme de la non intervention de l’État. Pourquoi cela ?

 

Pendant de longues années, le Royaume-Uni a rejeté toute UE sociale et parallèlement encouragé le dumping social par l'élargissement aux pays d'Europe de l'Est à la main-d’œuvre à bas coût, comme par exemple dans le transport routier[11]. Aujourd'hui la pénurie de main-d’œuvre au Royaume-Uni est finalement riche d’enseignement pour l’UE et ses États membres, car sans le Brexit, le sujet de la revalorisation salariale et de la relocalisation de certains emplois se serait-il posé ?

5)      Le secteur agricole était protégé par l'UE, après le Brexit les agriculteurs britanniques seraient en difficulté.

Une grande partie des propriétaires terriens et des agriculteurs bénéficiaient de subventions de l'UE, la fameuse Politique Agricole Commune (PAC). Or, le système de la PAC a été dénoncé pour plusieurs raisons au premier rang desquelles l'encouragement de l'agriculture intensive peu respectueuse de l'environnement et de l'agro-business[12] au détriment des exploitations à taille humaine.

Depuis sa sortie de l'UE, le gouvernement britannique s'est fixé de promouvoir une agriculture écologique et qui assure la sécurité alimentaire du pays avec comme objectif de produire 60% des denrées alimentaires consommées dans le pays. Cependant, le talon d’Achille de ce projet réside précisément dans les accords de libre-échange[13] conclus avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande entre autres. Ces accords prévoient une exonération totale des droits de douane sans limiter le nombre de marchandises que ces deux pays pourront exporter vers le Royaume-Uni, aussi bien pour la viande comme le bœuf ou l'agneau que pour les produits laitiers. La concurrence induite se fera au profit des produits australiens et néo-zélandais moins chers du fait d’un élevage plus industriel aux normes sanitaires plus souples, sans compter la pollution liée au transport.

 

 Le Brexit ne résout pas magiquement le besoin d'un renouveau démocratique appelé se leurs vœux par une majorité de Britanniques[14]. La sortie de l'UE était le préalable à la reprise en main des affaires de la cité, mettant au pied du mur les responsables politiques qui, trop souvent, rejetaient les conséquences de leurs décisions sur l'UE mais aussi en redonnant aux citoyens la mesure de leur rôle essentiellement politique.

 

Antoine Bourge

03/04/2024



[2]Équivalent britannique de l'INSEE.

[5]"Les nations avec les décès en excès les plus importants pendant la période de l’étude sont ceux qui ont connu des investissements inférieurs dans leurs systèmes de santé. Par exemple, l’Autriche, qui a déploré très peu de décès toutes causes, possède presque trois fois plus de lits d’hôpital par habitant que le Royaume-Uni." https://www.ined.fr/fr/tout-savoir-population/memos-demo/focus/covid-19-la-france-au-8eme-rang-parmi-21-pays-industrialises-en-termes-de-bilan-de-mortalite/

[6]En octobre 2020, Boris Johnson a déclaré qu’était venu « le moment où l’État doit prendre du recul et laisser le secteur privé prendre les choses en main ».

[7]L’Angleterre & Pays de Galles et l’Espagne ont connu l’impact le plus important : environ 100 décès pour 100 000 habitants, soit l’équivalent d’une augmentation relative des décès de 37 % en Angleterre & Pays de Galles, et 38 % des décès en Espagne. Source : Ined.

[8]Lire le rapport "La pauvreté et l'exclusion sociale en Grande-Bretagne" – Insee (2005).

[9]10,4% sur un an (février 2022-février 2023).

[12]Un milliardaire saoudien aurait perçu, en 2016, pour plus de 400’000 £ de subventions européennes pour son élevage de chevaux de course au Royaume-Uni.

[14]89% sont en faveur d'une réforme des institutions afin de favoriser le développement de la démocratie locale.  Rapport complet sur https://www.ippr.org/articles/talking-politics-building-support-for-democratic-reform

Sortir de l’UE et de la guerre en 10 points

Je reprends ici quelques éléments que je donne dans ma vidéo consacrée à ce sujet, l’Europe c’est la guerre ! (cliquer sur le lien ci dessous)


https://www.youtube.com/watch?v=7GjEmHjh9rc

 

Contre tous les discours qui vantent depuis des décennies « L’Europe de la Paix », il faut nous rendre à l’évidence: L’Europe, c’est en effet la guerre.

 

1/ Les discours guerriers se suivent et se ressemblent.

Macron donne cette tonalité à l’union européenne:

« Nous avons la conviction que la défaite de la Russie est indispensable à la sécurité et la stabilité en Europe ».

Il préconise:

« les frappes dans la profondeur, pour les missiles et bombes à moyenne et longue portée » 

Il menace d’envoyer des troupes et expose de la sorte la nation et la jeunesse qui devrait subir le SNU comme formation militaire.

« qu’il n'y a pas de consensus aujourd'hui pour envoyer de manière officielle, assumée et endossée des troupes au sol. Mais en dynamique rien ne doit être exclu »,

Il inscrit sa détermination dans la durée:

« Nous sommes prêts à faire aussi longtemps que ce qui est nécessaire, et tout ce qui est nécessaire, pour que la Russie ne puisse gagner cette guerre »…

 

2/ La détermination des autres chefs d’états européens différent sur la forme, mais est identique sur le fond. L’engagement également.

Les Allemands donnent le ton (fourniture d’armes, conseillers sur le terrain). Le chancelier Olaf Scholz déclare « il faut faire plus ».

Donald Tusk, Premier ministre polonais, affirmait ainsi ce jeudi 7 mars que les pays du continent se trouvaient dans une période « d’avant-guerre ».

Le premier ministre suédois, Ulf Kristersson se rend à Washington pour la ratification de l’adhésion de la Suède à l’OTAN.

 

3/ Cette politique est le relai de l’OTAN

Rob Bauer, président u Comité militaire de l’OTAN , affirmait en janvier dernier que "Nous nous préparons à un conflit avec la Russie ».

Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN: « nous devons nous préparer à une confrontation qui pourrait durer des décennies ».

Et les russes répondent dans la même direction:

Vladimir Zarudnitski, chef de l'Académie militaire de l'état-major de l'armée russe: « la probabilité que notre État soit délibérément entraîné dans de nouveaux conflits militaires augmente considérablement » car « le conflit en Ukraine pourrait s'élargir à l’Europe » .

 

 

4/ Ursula Van der Leyen est félicitée par Biden pour « la décision historique de l’union européenne d’approuver un soutien financier supplémentaire de 50 milliards d’euros à l’Ukraine. »

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens  Stoltenberg la félicitait à son tour le 16 février en ces termes: « vous avez joué un rôle déterminant pour porter la coopération entre l’OTAN et l’union européenne a des niveaux sans précédent »

 

5/ Les dépenses militaires dans l’union européenne passent de 240 milliards d’euros en 2022 à 350 milliards cette année.

Ursula préconise une « Future stratégie industrielle de défense européenne », destinée à produire plus d’armes et de munitions. « l’Europe doit se réarmer, revoir sa politique de défense et son budget en la matière ».

Les budgets militaires explosent: Madrid par exemple +19,3%, la Suède + 30,1%, la Lituanie  +27,6%…

 

6/ L’Union Européenne prévoit de fabriquer 1 millions 400 milles obus de 155mm en 2025, soit davantage que les 1 million 200 milles prévus à cet horizon par les Etats-Unis.

 

7/ Pour la jeunesse, En 2024, la Lituanie, le Danemark, la Suède, la Norvège, la Finlande, la Lettonie, l’Autriche, la Grèce et l’Estonie disposent d’une forme de service militaire obligatoire. Voilà qui donne un certain éclairage au Service national universel en France.

 

8/ Les fonds destinés à la guerre sont pris sur les besoins de la nation: école, santé, services publics, allocations chômage…L’ancien économiste en chef du Fond monétaire international olivier Blanchard préconise des coupes drastiques -je cite- «  dans les retraites, le paiement des fonctionnaires ou encore les allocations chômages »… et conseille, « l’augmentation des dépenses liées à la défense.

 

9/ La guerre, c’est la défense des intérêts dans grands capitalistes au niveau mondial.Les importations sont passées de trois cent cinquante et un mille tonnes avant guerre, à plus de 6 millions en 2023, selon les derniers chiffres de la commission européenne.

Ce qui est vrai pour le blé l’est aussi dans d’autres domaines, les poulets notamment, bourrés de produits dégueulasses qu’on retrouve dans notre assiette.

 

10/ Les mêmes s’en mettent plein les poches. L’agriculture ukrainienne est en effet dominée par des oligarchies et des multinationales depuis la privatisation des terres publiques qui a suivi l’effondrement de l’Union Soviétique en 1991.

On  trouve ainsi des intérêts étrangers divers - principalement européens et nord-américains, y compris un fonds d'investissement privé basé aux États-Unis et le fonds souverain d'Arabie Saoudite.

 

Jacques Cotta

Le 3 avril 2024

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